Justine Dreher : « Un début de saison très positif »

Brillante 5e de l'open de Nouvelle-Zélande après avoir tenu tête à Lydia Ko, actuelle 18e de l'ordre du mérite du Ladies European Tour et première rookie, Justine Dreher revient sur son début de saison - et de carrière - très prometteur.
Quel bilan tirez-vous de ces deux mois en Australie, les deux premiers de votre carrière pro ?
C'est plutôt positif ! Je suis partie en Australie très peu de temps après les cartes européennes (qui se sont terminées le 22 décembre et dont elle a pris la 10e place, ndlr), et je ne savais pas trop dans combien de tournois du Ladies European Tour j'allais pouvoir rentrer. En venant des cartes la catégorie qu'on obtient ne donne pas accès à la totalité des tournois de la saison, donc c'est pour ça que j'ai décidé de partir début janvier pour pouvoir participer aux tournois du circuit australien. Si je jouais assez bien, ça me permettait de rentrer dans les grands rendez-vous de début de saison du LET en Australie et en Nouvelle-Zélande. J'ai donc fait quatre semaines de tournois, des petits pro-ams d'un jour ou deux, en espérant marquer assez de points de me qualifier pour les grosses épreuves. Ça s'est plutôt bien passé puisque j'ai réussi à me qualifier pour les quatre gros tournois de début de saison (les opens du Victoria, de Nouvelle-Zélande et d'Australie, ainsi que le Masters australien, ndlr). C'est très positif car en tant que rookie je n'étais assurée de rien. Je crois d'ailleurs que je suis la seule rookie à les avoir tous joués.
Qu'est-ce qui vous a motivée à partir en Australie jouer le ALPG Tour ?
C'est Isabelle Boineau qui m'avait contactée et parlé de ce circuit. J'en ai discuté avec elle, ainsi qu'avec Marion Ricordeau, et toutes deux m'ont conseillé de faire ces tournois car ça pouvait me permettre d'accéder aux grands rendez-vous. Donc j'ai regardé tout ça et j'ai opté pour cette solution. Dès que j'ai eu toutes les infos en main, je me suis inscrite et je suis partie !
Pas toute seule, d'ailleurs, puisque d'autres Françaises ont elles aussi fait le voyage...
Oui, j'ai eu la chance de ne pas être seule puisque Inès Lescudier et Alexandra Bonetti sont venues elles aussi. Marion et Isa nous ont donné toutes les infos nécessaires pour les visas, la logistique, ce qui nous a pas mal aidé. Inès et Alex étaient dans une situation plus délicate puisqu'elles ne rentraient pas du tout dans les tournois du LET étant donné qu'elles n'ont pas la carte pleine, mais au final Inès s'est qualifiée pour l'open de Nouvelle-Zélande, et Alex pour la Nouvelle-Zélande et le Masters. Pour toutes les trois ça a été une bonne solution qui nous a offert de belles opportunités.
En six pro-ams vous avez signé cinq top 20, dont une 5e et une 2e place lors des deux derniers. Avez-vous été surprise de vous retrouver si vite au sommet des leaderboards ?
Surprise, non. Je n'ai pas très bien joué sur les deux ou trois premiers, mais je ne me suis pas trop affolée. Il m'a fallu un peu de temps pour me mettre dans le bain. Je n'ai pas pu faire de « reco » sur les premiers tournois, j'avais le décalage horaire à récupérer, etc. Donc je n'ai pas extrêmement bien joué, mais j'ai quand même réussi à marquer quelques points. Puis petit à petit j'ai retrouvé le rythme, je me suis bien entraînée entre les épreuves, et mon jeu est revenu. Je suis contente de mes résultats, mais pas tellement surprise. Ça faisait quelques mois déjà que je commençais à vraiment bien jouer, que mon jeu était en place, que je progressais. Je venais de faire -10 aux cartes fin décembre, et depuis octobre je sentais que j'avais déjà évolué dans le bon sens. Le but était que ce mois de janvier me permette d'arriver prête pour les grands tournois de février. Et puis j'étais contente de pouvoir jouer en compétition, tout simplement, car si j'étais restée en France en janvier je serais arrivée en Australie sans tournoi derrière moi. Là, ce n'était pas le cas, et ça m'a permis d'être tout de suite dans le rythme.
Début février, le Victorian Open était votre premier vrai tournoi en tant que pro, le premier sur quatre tours. Comment analysez-vous, avec le recul, cette très belle 5e place ?
C'était une super expérience ! Il y avait de très bonnes joueuses du LET, et dans ma tête c'était vraiment le début de ma saison. Le premier jour il y avait énormément de vent et j'ai réussi à jouer dans le par, donc j'étais très contente de moi. J'ai fait une bonne partie le lendemain et je me suis retrouvée pas loin de la tête, donc j'ai joué dans les dernières parties le samedi et le dimanche. J'ai fait un samedi correct, mais le dimanche je n'ai pas vraiment joué pour la gagne. C'était ma première expérience à ce niveau, et je pense que je me suis un peu laissée impressionner. J'étais un peu trop passive sur le parcours. Au final j'étais contente de ma cinquième place, mais un peu amère car j'avais l'impression de ne pas avoir utilisé toutes mes ressources. J'ai mis 14 trous à m'en rendre compte, et je me suis dit qu'au moins la prochaine fois où je serai dans cette situation, je ne réagirai plus comme ça. Je donnerai tout, même contre des filles plus fortes, et je tenterai ma chance jusqu'au bout. Malgré tout j'étais ravie d'avoir finie cinquième, ce qui m'assurait une place à l'open Australie.
Vous vous êtes retrouvée en dernière partie le dimanche dès la semaine suivante à l'open de Nouvelle-Zélande, où vous avez joué en compagnie de la numéro un mondiale, tenante du titre et future vainqueur du tournoi, Lydia Ko... Avez-vous réussi à mieux gérer cette situation ?
Je n'avais pas du tout la même attitude le dimanche en Nouvelle-Zélande que la semaine d'avant à Melbourne. Ça aurait pu être encore plus impressionnant, d'une part parce que contrairement au Vic Open c'était un tournoi du LET, et d'autre part parce que je jouais avec Lydia Ko. J'ai vraiment mieux géré le dimanche, alors qu'au final j'ai aussi terminé cinquième. Ce n'était pas pareil, car je lui ai tenu tête jusqu'au bout, même si je n'ai pas réussi à jouer assez bien sur la fin pour la priver de la victoire. Mais je me suis battue du début à la fin, et je ne me suis pas laissée impressionner. À aucun moment je n'ai lâché. J'ai utilisé l'expérience de la semaine précédente pour mieux gérer celle-ci. J'ai pris ma revanche sur moi-même, et je me suis prouvé que j'étais capable de bien jouer plusieurs semaines d'affilée.
Parlez-nous un peu de votre partie avec la numéro un mondiale, Lydia Ko... Comment s'est-elle comportée ?
Elle est vraiment super sympa ! Tout le monde m'avait dit que je n'avais pas trop à m'inquiéter de jouer avec elle le dimanche, et c'était le cas. C'est une fille très... normale. On s'attend à quelqu'un d'impressionnant, mais pas du tout. Forcément, comme on était en Nouvelle-Zélande, il y avait beaucoup de monde pour la suivre. C'était un peu difficile à gérer car les gens étaient plus là pour elle que pour moi, et quand elle avait fini son trou ils commençaient à bouger sans trop attendre que j'aie terminé. Il y avait pas mal de bruit, de mouvement, donc c'était délicat. Elle a été super sympa, tout comme son caddie : ils se sont rendus compte de cela et ils ont souvent demandé aux gens d'attendre. Franchement, c'était hyper respectueux et très sympa ! On n'a pas trop discuté car j'ai essayé de rester dans ma bulle, mais les deux ou trois fois où on a échangé, c'était très sympa, très simple.
Et au niveau du jeu, qu'est-ce qui lui permet selon vous d'être à ce point meilleure que les autres ?
Tout ! Tout son jeu est très complet. Et je pense qu'elle se connaît très bien. Si par exemple en début de partie elle rate un petit peu un coup, vous pouvez être sûr qu'elle ne le ratera pas une deuxième fois. Elle est très précise dans tout ce qu'elle fait. Sur les mises en jeu, même si elle n'est pas la plus longue du circuit, sa précision lui permet de pouvoir utiliser le driver presque partout. Elle ne rate pas un coup de wedge, elle ne met jamais un coup de moins de 150 mètres très loin du drapeau... Et enfin elle putte très bien. C'est comme si elle n'avait pas de faiblesse !
La semaine suivante à l'open d'Australie, vous disputiez votre premier tournoi du LPGA Tour. Avez-vous eu le sentiment de découvrir un autre univers ?
Oui, c'était encore autre chose ! La semaine précédente c'était déjà impressionnant d'être au practice à côté de joueuses comme Lydia Ko, Caroline Hedwall ou Gwladys Nocera, mais là pour le coup c'était ça fois dix ! C'était super, et pendant les jours d'entraînement j'ai regardé un peu ce que faisaient les meilleures joueuses du monde, les coups qu'elles tapaient au practice. C'était intéressant. Mais je commençais à moins bien jouer, à être un peu fatiguée. C'était une semaine un peu plus compliquée. Le parcours était difficile, et il demandait une grande précision sur les attaques de greens. Il fallait un bon long jeu pour scorer cette semaine-là, et je n'étais pas du tout en cannes. Donc ça a été compliqué. Le premier jour j'ai très mal tapé, et je me suis énormément appuyée sur mon petit jeu pour faire +2 et garder une petite chance. Mais il aurait fallu bien jouer le lendemain, ce qui n'a pas été le cas.
La semaine suivante au RACV Ladies Masters, où vous avez terminé 51e, c'était pareil ?
Oui... C'était aussi un parcours avec des greens très fermes et des chips très difficiles autour des greens, donc il fallait à nouveau avoir un long jeu bien réglé. Là encore je n'avais pas le jeu pour être dans le coup. Ça faisait huit semaines que j'étais partie, que je n'avais pas vu mon coach, donc c'était un peu difficile de régler mon jeu toute seule. Je ne tapais pas très bien depuis dix jours, donc j'avais perdu confiance. Mais ça fait partie des expériences qui me feront progresser. C'est le début de ma carrière, et ça va m'arriver à nouveau de partir plusieurs semaines d'affilée sans mon staff.
De qui se compose votre staff, justement ?
Mon coach est Édouard Bréchignac, et Thomas Brégeon s'occupe de moi pour la partie physique. Je ne travaille pas depuis très longtemps avec eux puisque je suis rentrée des États-Unis, où j'ai passé quatre ans, l'été dernier. Là-bas, je m'entraînais avec Puggy Blackmon, mon coach à l'université de Caroline du Sud, et avec Karine Mathiot qui encadrait l'équipe de France dames. Depuis que je suis rentrée je suis avec Édouard. Quant à Thomas, on avait un peu bossé ensemble quand j'étais au pôle, et on a recommencé au cours de ma dernière année à la fac. Au début il m'envoyait des programmes de prépa que je faisais de mon côté aux USA, mais maintenant que je suis en France je le vois beaucoup plus souvent, étant donné que je suis installée près de Paris et que je m'entraîne principalement au Golf National. Enfin, je travaille avec un caddie anglais du nom de Will Swift depuis le Lacoste Ladies Open de France l'an dernier. On a convenu qu'on allait bosser ensemble cette saison, mais c'est toujours un peu compliqué quand on débute sur le circuit, car on ne sait pas exactement quels tournois on va pouvoir jouer, donc je croise les doigts pour que ça ne change pas !
Quel bilan tirez-vous de votre cursus universitaire aux États-Unis ?
Ça m'a apporté énormément de choses. Quatre ans c'est long, donc on a le temps d'évoluer aussi bien golfiquement qu'humainement. Je pense que j'ai bien été entourée, notamment par Puggy. C'était un très bon mentor, il m'a fait beaucoup évoluer et m'a fait prendre conscience de mon potentiel. Il a fait une énorme différence. Après le lycée je n'avais pas du tout le niveau pour passer pro, et en plus je voulais faire des études car je n'étais pas sûre de ce que je voulais faire. Donc aux USA j'ai pu faire des études, en management du sport et événementiel, et progresser golfiquement.
Quel est votre calendrier pour le reste de la saison ?
Je devrais rentrer dans la plupart des tournois du LET désormais, à l'exception du tournoi en Chine la semaine prochaine (le World Ladies Championship, ndlr). Donc je reprendrai au Maroc début mai pour la Lalla Meryem Cup. J'ai donc deux mois sans tournoi devant moi pour bien m'entraîner.
Quels objectifs vous êtes-vous fixés ?
Vu ce que j'ai réussi à faire en ce début de saison, l'objectif de garder la carte me semble assez raisonnable. Quant à jouer un Majeur, ça va sans doute être un peu difficile pour cette saison. Il y a des places au British Open pour les 25 premières de l'ordre du mérite du LET début juin, et des qualifications pour l'US Open et l'Évian Championship, donc pourquoi pas. Mais ça ne dépend pas que de moi, donc je ne peux pas le contrôler. C'est sûr que ça ferait partie des expériences que j'aimerais vivre au plus vite !
Enfin, sur le plus long terme, envisagez-vous de tenter votre chance sur le LPGA Tour ?
Oui, bien sûr ! Je suis ravie d'avoir la chance d'évoluer sur le LET cette saison, mais j'aimerais dans le futur, et le plus rapidement possible, jouer aux États-Unis. Je pense que je n'étais pas prête pour y être dès cette saison (elle a échoué à la deuxième étape des cartes d'accès du LPGA Tour, ndlr). J'ai besoin d'encore un peu de formation, mais c'est sûr que j'ai envie de jouer sur le LPGA Tour. Je retournerai aux cartes à la fin de l'année, et d'ailleurs la plupart de mes objectifs de la saison visent à me préparer pour ce rendez-vous.
When your job makes you go to the most beautiful places in the world... #austrlia #ALPGTour16 #OatesVicOpen pic.twitter.com/G6cRI6YVGt
— Justine Dreher (@justine_dreher) 31 janvier 2016
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