Ricordeau : « Les cartes du LPGA en fin d'année »

Présente en Australie depuis mi-janvier avec une victoire à la clé, Marion Ricordeau a parfaitement mis à profit son escapade de deux mois aux antipodes pour se préparer pour la nouvelle saison. 22e joueuse européenne en 2014, la Picarde de 28 ans nourrit des ambitions plus élevées pour 2015, avec en ligne de mire les cartes d'accès au LPGA Tour.
Revenons sur votre fin de saison 2014, marquée notamment par une 8e puis une 2e place dans les deux tournois en Chine. Comment expliquez-vous cette belle fin d'année ?
J'avais fait un été moyen, avec trois cuts ratés de suite en juin et juillet. Même si je savais depuis fin août que j'allais garder ma carte, je restais sur une impression amère, car je ne jouais pas mal mais les scores ne reflétaient pas du tout mon niveau. J'ai encore raté le cut au Lacoste Ladies Open de France parce que je me suis mis une pression monstre. J'ai tellement voulu bien faire que finalement j'ai tout fait de travers ! Je me suis reprise en main ensuite, et j'ai essayé de me détacher du résultat. Après l'Afrique du Sud où j'ai bien joué, je suis arrivé en Chine pour le Sanya Ladies Open. J'ai très, très bien joué du tee au green, mais très mal putté. En arrivant à Xiamen la semaine suivante, j'ai donc fait beaucoup de putting à l'entraînement car je voulais éviter de revivre la même chose. Pendant le tournoi mon grand jeu n'a pas été fabuleux, mais j'ai très bien putté, 27 ou 28 putts par jour, et comme je n'ai presque pas fait de bogey sur la semaine forcément les scores s'en sont ressentis.
Avez-vous des regrets de ne pas avoir pu aller chercher la victoire dans ce Xiamen Open ?
Pas vraiment, car l'amateur qui a gagné (la Chinoise Ssu-Chia Cheng, ndlr) a très bien commencé sa journée alors que de mon côté j'étais toujours dans le par après six ou sept trous. Je savais que ce serait difficile de gagner. Mais je savais aussi que comme elle était amateur, le chèque de la première place reviendrait à la dauphine. Donc je me suis battue comme une acharnée pour aller chercher cette position. Il se trouve que c'est Alexandra Vilatte qui était 2e au départ du dernier tour, donc c'était un peu bizarre de se battre contre elle, mais que ça soit elle ou une autre l'objectif était d'aller la chercher. À trois trous de la fin j'avais un coup d'avance, j'ai putté pour birdie mes trois derniers trous et ça n'est pas tombé, mais au final j'ai fini seule 2e. C'était une chouette expérience.
Est-ce que ce résultat, le meilleur de votre carrière sur le LET, peut constituer un déclic pour viser une marche au-dessus ?
En tout cas, ça m'a fait prendre conscience que je n'avais pas besoin de jouer parfaitement pour faire un bon résultat. Il faut juste que les choses se goupillent bien à tous les niveaux. J'ai pris conscience que je pouvais faire de belles choses sans produire le jeu du siècle. La preuve, la semaine précédente a été l'une de mes meilleures de l'année en termes de grand jeu, et j'ai fini 8e. Donc oui, j'ai réalisé qu'en étant patiente, et même si les choses ne se déroulent pas tout le temps comme je le veux, je pouvais faire de bons résultats. C'était assez plaisant, ça a ouvert une petite porte à l'intérieur de ma tête. J'ai toujours pensé que je pouvais gagner, car on joue tous pour avec cette idée en tête, mais j'ai compris un peu mieux comment y arriver.
Après le dernier tournoi de la saison 2014 à Dubai, qu'avez-vous fait pendant la coupure hivernale ?
J'avais décidé de prendre quatre semaines de vacances pour profiter de ma famille et mes amis en France. Et sans jouer, chose que je n'avais jamais fait de ma vie. Finalement je n'ai pas tenu, j'ai joué quatre fois sur l'ensemble du mois... C'était une bonne chose au final car je suis arrivée en Australie en n'ayant pas totalement coupé.
Qu'est-ce qui vous a motivée à effectuer cette longue tournée aux antipodes ?
Je l'avais faite l'an dernier, et je m'étais d'ailleurs qualifiée pour l'Open d'Australie, qui était le but de mon voyage. Donc je me suis dit « pourquoi pas retenter le coup ? » Et plutôt que de rester en France s'entraîner par un temps de chien tout l'hiver, autant aller là-bas ! Une fois qu'on y est, y rester quelques semaines de plus ne change pas grand-chose. D'autant que j'ai la chance de voyager toute l'année avec mon ami Iñigo, qui me caddeye sur les tournois : pour nous, qu'on soit en France ou en Australie, c'est pareil ! On a donc programmé ce voyage de deux mois en novembre, en se disant que le meilleur moyen de jouer l'Open d'Australie était de se qualifier via les petits tournois organisés par l'ALPG Tour en amont. Et puis ça fait un petit mois d'entraînement dans d'excellentes conditions, donc ça aurait été dommage de passer à côté de cette opportunité !
À quoi ressemble votre quotidien durant ces deux mois ?
Le circuit australien est très bien organisé et s'occupe parfaitement de l'accueil des joueuses internationales. On est partis pour huit semaines au total, et pendant les cinq premières, avant les trois gros tournois en Australie et Nouvelle-Zélande, on était logés dans des familles d'accueil. On rencontre des gens super, ou on revient chez des gens qu'on a connu l'année précédente, donc c'est un vrai plaisir d'aller là-bas ! Et puis, financièrement, on peut se permettre ce voyage car ça ne nous coûte presque rien en dehors des billets d'avion et des locations de voiture.
Isabelle Boineau fait la même tournée aux antipodes. Vous vous voyez souvent ?
On se voit tous les jours, et on joue parfois ensemble les parties d'entraînement. C'est sympa de se retrouver à l'autre bout du monde car on ne fréquente pas forcément les mêmes personnes quand on est sur le circuit tout au long de l'année, et là c'est cool d'être toutes les deux d'autant qu'on s'apprécie beaucoup. En plus, comme on est les seules Françaises, on est un peu chouchoutées par les gens !
Le circuit australien offre-t-il une bonne préparation pour les grosses épreuves co-sanctionnées par le LET et le LPGA Tour, à savoir le RACV Ladies Masters cette semaine, puis l'Open d'Australie et l'Open de Nouvelle-Zélande ?
C'est compliqué de se tester, car sur les quatre premières épreuves que j'ai disputées, j'ai joué à chaque fois avec des amateurs. Ça a un côté assez frustrant, car même si je fais mon job sur le parcours, je ne vois pas ce qui se passe à côté. On ne le sait qu'à la fin de la journée. Même si les amateurs sont sympa, c'est un peu dérangeant de ne pas jouer avec les pros, de ne pas pouvoir se confronter directement. On dit que le golf c'est de se battre contre soi-même, mais au final le golf pro c'est quand même de se battre contre les autres ! Quant au niveau de jeu, on va dire qu'il y a de tout... Du très bon car la plupart des meilleures Australiennes sont là, ainsi que quelques filles du circuit européen. Mais après, il y a celles qui jouent uniquement sur l'ALPG Tour, et des enseignantes qui n'ont pas beaucoup d'occasions de jouer des épreuves pro. C'est assez hétérogène.
Quel sera votre programme après cette tournée aux antipodes qui se conclura à la fin du mois ?
Il y a le World Ladies Championship en Chine mi-mars, la Coupe Lalla Meryem au Maroc fin mars, puis plus rien sur le LET jusqu'à début mai. Ça me donnera l'occasion de jouer le Grand Prix Schweppes PGA au Médoc et l'Open Generali à Dinard. Ce sont deux tournois en France, pas trop loin de la maison, que j'aime beaucoup, notamment le Schweppes où j'avais très bien joué l'an dernier. Après, si ma saison se déroule bien, j'ai comme objectif d'aller tenter les cartes américaines en fin d'année. Il faudra que ça roule dès le début, que mon niveau soit régulier toute l'année, car si je joue au yo-yo comme en 2014 je risque de ne pas avoir assez de confiance pour y aller.
Quelles sont les raisons qui vous poussent à tenter votre chance aux États-Unis ?
J'ai toujours eu l'ambition de me mesurer aux meilleures, et pour l'instant elles sont là-bas. J'aimerais bien que le LET grandisse à tel point que ça ne soit pas nécessaire d'aller jouer aux USA, mais pour le moment il n'y a pas le choix. En plus, je pense que j'ai un jeu qui correspond assez bien aux parcours du circuit américain, étant donné je suis plutôt dans la bonne moyenne en termes de longueur. Il y a aussi le fait que pour se qualifier pour les Jeux Olympiques, le seul moyen est de marquer des points au classement mondial. Pour l'instant je suis assez loin, et les points se marquent plus aux États-Unis qu'en Europe. Donc l'objectif est de décrocher la carte en fin d'année pour commencer début 2016 sur le LPGA Tour.
Avez-vous pris des conseils auprès des Françaises qui évoluent déjà là-bas ?
J'en ai parlé avec Sophie Giquel-Bettan, qui y a déjà joué et y retourne à moitié cette saison. Mais ce n'est pas quelque chose dont on parle beaucoup entre filles. C'est assez étrange, on a l'impression parfois que c'est un secret, un sujet tabou. À vrai dire, je ne sais pas pourquoi... Donc j'en ai parlé un peu avec Sophie, et ça m'a été utile puisque mon projet, de partir m'installer là-bas avec mon ami, ressemble beaucoup au sien, étant donné qu'elle voyage avec son mari Axel qui la caddeye. Je sais aussi que je peux compter sur Patricia Meunier-Lebouc, qui vit en Floride. C'est rassurant.
Quelles sont vos ambitions pour la saison qui démarre, et notamment les Majeurs ?
Je ne suis qualifiée pour aucun pour le moment, et j'aimerais en jouer deux cette année. Pour le British il faut être dans le top 25 de l'ordre du mérite à la mi-juin. Je serai très déçue si je n'y suis pas, car ça voudra dire que je n'ai pas rempli mon objectif de constance. Quant à Évian c'est plus dur, car il faut gagner un tournoi. Enfin il y a toujours la possibilité de jouer l'US Open, puisqu'il y a une épreuve de qualification organisée pour les Européennes en Angleterre qui offre dix places. Donc si je joue deux, voire trois Majeurs cette saison, ça voudra dire que les choses se passent comme je l'espère dans l'optique des cartes américaines.
Avec qui travaillez-vous pour vous donner les moyens de remplir vos objectifs ?
Au niveau technique, je m'entraîne avec Patrick Talon depuis trois ans maintenant. J'ai aussi un préparateur mental, avec qui je travaille sur mon golf après avoir beaucoup travaillé sur moi-même. Je n'ai pas de préparateur physique, mais je fais du volley quand je suis à la maison, et donc la préparation physique qui va avec. Enfin mon caddie, depuis quasiment quatre ans, est mon compagnon Iñigo. On forme une bonne équipe, on s'éclate bien tous les deux !
Propos recueillis par Alexandre Mazas
Photos : Alexis Orloff / ffgolf (sauf mention)
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